Il y a des jours, comme ça, où on regrette de s'être levée, où on se dit vivement ce soir avec l'illusion qu'on arrivera encore à trouver le sommeil.
Ce jour-là, je l'ai vécu il y a peu de temps.
Ce jour-là, j'ai pris en pleine face et comme une grande gifle à laquelle on ne s'attend pas parce qu'on n'a pas fait de bêtise, le fait que je ne suis plus bonne à rien.
Je m'explique :
Nous avions rendez-vous, notre premier rendez-vous, pour l'adoption.
Comme tout premier rendez-vous, on s'y rend le cœur battant, plein d'appréhension, on essaie de se dire que ça va bien se passer, tout en évitant de se faire trop d'idées afin de ne pas être déçus si ça tourne mal...on joue à l'équilibriste quoi.
Surprise, les interlocutrices sont sympathiques, le rendez-vous se passe bien, jusqu'à une petite phrase à l'arrière goût de ciguë...
" Vous avez l'air motivés, mais je crains fort que votre âge soit un sérieux obstacle à l'adoption, du moins en ce qui concerne la France. "
BOOM!
Je suis une vieille peau.
Alors de là à dire que de la vieille peau à la vieille charogne il n'y a qu'un pas, je vais pencher du mauvais côté et dire tout haut ce que je pense depuis un sacré bout de temps tout bas déjà.
Adopter, c'est un peu passer un permis d'enfant.
On vous jauge, vous écoute, vous passe au tamis, on examine vos restes, parce qu'en général, on n'arrive pas par hasard à la décision d'adopter : cela passe par une grossesse qui se termine mal, voire plusieurs, comme dans mon (dans notre cas, les papas aussi morflent dans ces moments là, faut pas croire, les mamans n'ont pas le monopole) .
Bref, on regarde à la loupe ce qui reste de vous après le tsunami, après Attila, après Hiroshima et tout ce que la Terre a connu de pire, et finalement, on vous dit ou non si vous pouvez adopter.
Je me demande juste...
Elles ont été passées au crible aussi, les mères des petites victimes qui font la une des journaux ces temps-ci?
Certaines avaient de bons congélateurs, d'autres de bons poings, les dernières un compagnon fidèle qui s'est chargé du sale boulot pendant que mesdames pleuraient sur commande devant les journalistes en clamant qu'elles vivaient un calvaire...
Ça leur est venu à l'idée de simplement abandonner leur bambin à une personne "peut-être trop vieille" qui en prendrait soin comme de la prunelle de ses yeux?
Ah ça, on les voit les marches silencieuses, les gens qui marchent avec leurs bougies, comme si ça allait ranimer les pauvres anges qui n'avaient rien demandé.
On en voit d'autres aussi (qui sait, certains défilent peut-être pour l'un et l'autre, même si ça me fait froid dans le dos), mettre la France en sang pour interdire aux gays de se marier, pire, d'avoir des enfants, bah oui, quoi, ils leur feront je ne sais quoi de bien pire que tous ces gentils couples d'allumés qui tuent leurs mômes de sang froid.
Elle est où, l'autre blondasse peroxydée qui défilait en appelant à coup de mégaphone qu'il fallait réviser les lois, que c'était honteux?
La justice, elle existe, c'est même elle qui m'a jeté à la gueule que j'avais quarante-deux ans et que je n'étais plus bonne à rien...
Effectivement, toutes ces "mères exemplaires" qui font la une des journaux sont beaucoup plus jeunes, c'est un fait, mais elles l'ont eu où, elles, leur "permis de materner"?
Je viens de découvrir votre blog. Ce que vous écrivez me touche à travers la simplicité des mots justes. Comme il est dommage que vous ne continuez pas... Je vous souhaite d'avoir pu concrétiser cette adoption... Peut-être est-ce là la cause de votre silence, heureuse d'être emportée par le courant doux et dense de la maternité. Au plaisir de vous lire à nouveau.
RépondreSupprimerTrès jolie j'aime beaucoup
RépondreSupprimeril faut continuer